JE SUIS D’LA MAUVAISE HERBE,
Publié le 16/03/2022 | Grand angle
Braves gens, braves gens
Je pousse en liberté sur les chemins mal fréquentés…
À l’arrivée du printemps, chantons avec Georges Brassens les mauvaises herbes et profitons- en pour les débaptiser car, si certaines ont des qualités culinaires, elles favorisent toutes la biodiversité et devraient plutôt s’appeler : herbes spontanées ! Une liberté plutôt inspirante, non ?
MAUVAISES HERBES ET SAVOIRS POPULAIRES
Méprisées ou soudainement encensées par la mode culinaire, les «mauvaises herbes» racontent pourtant beau- coup de nos rapports à la nature dans un temps long.
Dans la première moitié du xxe siècle, les salades sau- vages (coquelicot, chicorée à la bûche, laiteron…) étaient encore considérées, notamment dans de nombreuses régions du sud de la France et de l’Espagne (surtout la Catalogne), comme des remèdes et des plantes dé- puratives. L’apparition des rosettes coïncidant avec le carême chrétien, de nombreuses recettes élaborées à cette période étaient composées d’herbes non cultivées.
Les savoirs qui relient les sociétés aux plantes ne sont pourtant pas voués à disparaître du jour au lendemain. Ils évoluent, se transmettent et se déplacent d’un genre, d’une profession, d’une génération, d’un territoire à l’autre.
Pour ceux et celles qui désirent cueillir des salades sauvages, la botanique — qui fonde principalement ses techniques d’identification sur les fleurs et les graines — s’avère souvent limitée. Les salades sauvages, en effet, doivent être récoltées quand elles sont tendres, avant que l’apparition de fleurs ou de graines ait ren- du la plante trop amère. Ainsi, les cueilleurs et les cueil- leuses utilisent et transmettent plutôt des informations relatives au goût, au toucher, à l’odeur et, comme le décrit l’ethnobotaniste Pierre Lieutaghi, au « territoire lui-même comme un système expert, une intelligence annexe ». (P. Lieutaghi, La Plante compagne. Pratique et imaginaire de la flore sauvage en Europe occidentale, Actes Sud, Arles, 1998.)
UN PEU D’HISTOIRE…
L’étude des mauvaises herbes, la malherbologie, est une science inventée au milieu du XIXème siècle par James Buckman, pharmacien chimiste anglais et Thilo Irmisch, botaniste allemand. Pour la première fois, la morphologie des mauvaises herbes était décrite. (Merci à Panthère Première)
LA CUEILLETTE, L’HISTOIRE D’UN GESTE
Armée d’un petit couteau dans son jardin et sur les chemins à côté de sa maison où poussent les herbes folles, L. cueille les pissenlits, l’ail des ours, les coquelicots et le fenouil sauvage. Elle en agrémente ses salades en été, ou s’en sert de condiments en automne. Se pencher, couper, mettre dans le panier, rentrer, rincer, cuisiner. Un rituel qu’elle a appris de sa mère, et sa mère de sa mère avant elle… Une histoire de femmes et une histoire de transmission, que L. poursuit avec les jeunes filles qui traversent sa route, sa tablée et sa maison.
Les pratiques de cueillette sauvage racontent aussi une autre liberté, faite de connaissances transmises de génération en génération qui apportent une part d’autonomie culinaire loin des logiques de marché. Apprenons-nous encore à nos enfants à laver la terre de la roquette ou de la bourrache et d’y enlever les petits vers qui parfois s’y cachent ? Cette réappropriation d’un savoir populaire varié tisse aussi une autre relation au monde vivant qui nous entoure.
QUI TE PIQUE ET T’AIME ?
L’ORTIE
Certes, enfant, l’ortie n’était pas notre amie lorsque nous jouions dans les champs et que d’un coup le mollet nous brûlait… Pourtant, en soupe ou en infusion, en salade ou à la place des épinards, la grande ortie et l’ortie brûlante (les espèces les plus courantes de par chez nous) ont de véritables propriétés médicinales : toniques, dépuratives, diurétiques, anti-inflammatoires, etc. Victor Hugo lui a même dédié un poème, J’aime l’araignée et j’aime l’ortie, dans lequel il défend les personnes dites margi- nales en les assimilant à cette plante et à l’araignée. Pour autant, ne poussez pas mémé dans les orties.
LA RONCE
Dans l’Orléanais, on prépare un vin de pousses de ronce. Les mûres de ronce sont évidemment délicieuses mais aussi à valeur médicinale et fort défendues par Pline l’Ancien dans l’Antiquité, notamment sous forme de sirop. Et la ronce est de manière générale considérée comme une plante médicinale.
En outre, elle prépare le terrain pour les forêts en proté- geant les jeunes arbres de la déprédation des chevreuils et des lièvres, en enrichissant et en améliorant le sol… La ronce servait aussi dans l’art de la vannerie, dont il reste de beaux exemples en Corrèze avec notamment Mr Raymond Lassalle !
CONSEIL LECTURE
Petit traité du jardin punk, Éric Lenoir
Avec en sous-titre : Apprendre à désapprendre, Éric Lenoir nous invite à pratiquer le jardin autrement, au-delà des conventions, avec son instinct et son in- tuition. Ce livre est nécessaire parce qu’il répond aux problématiques actuelles de l’écologie appliquée pour amener de la biodiversité dans chaque parcelle du quotidien et à l’embellissement de notre environ- nement quels que soient les connaissances, moyens financiers, etc.
Adoptez la culture punk pour créer un jardin imper- tinent et apprenez à le gérer en restant fainéant, re- belle, fauché et écolo !
Mais encore
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