JE VOUS DIS MERDE !

C’est la rentrée des classes ! L’heure des cahiers, des devoirs, d’espérer que la maîtresse est gentille et que l’enfant apprendra bien ses leçons… Et pourtant, on connaît tous ce poème de Jacques Prévert : « Il dit non avec la tête mais il dit oui avec le cœur (…) Et malgré les menaces du maître, sous les huées des enfants prodiges, avec des craies de toutes les couleurs, sur le tableau noir du malheur, il dessine le visage du bonheur. »

Chez Bibouille, on a décidé de mettre le bonnet d’âne à l’honneur, parce que les enfants désobéissants c’est quand même plus marrant.

Victor Hugo constatait : « Désobéir, c’est chercher. » Jean Cocteau, avec ses enfants terribles, déclarait : « Rien d’audacieux n’existe sans la désobéissance à des règles ». Plus largement, c’est ce que nous raconte la fiction pour enfants : elle développe le modèle du héros ou personnage principal, petit garçon ou petite fille qui doit s’éloigner d’un chemin tout tracé, désobéir aux attendus, pour croire en ses rêves, partir à l’aventure et devenir adulte.

On le sait, c’est connu : à l’âge du « non » correspond la prise de conscience du tout-petit qu’il existe en-dehors du corps de sa mère, son désir de s’affirmer comme être à part entière. Et à l’adolescence, le jeune revient à cette force du « non », à l’énergie du refus, pour affirmer son identité et son indépendance, en « contre ». Alors sans doute qu’on s’en passerait bien à ce moment-là, mais la désobéissance nous constitue anthropologiquement, de même que le besoin d’acquérir de l’information ou le désir d’accumulation.

La désobéissance, c’est le mouvement de la pensée qui se cherche pour mieux se constituer. Souvent d’ailleurs, on désobéit à ce qu’on nous a appris pour mieux y revenir.

Il y a une férocité dans le « non », et il faut du courage et de l’imagination pour désobéir. Dans le film Zéro de conduite de Jean Vigo, en visionnage gratuit sur Youtube, un collégien crie à son professeur « Je vous dis merde ! ». 42 minutes pour nous rappeler qu’il y a une joie solide, inamovible, dans la recherche et la construction de nos libertés.

À nos enfants libres !

Lucie Olivier