RÉCITS
Publié le 29/06/2020 | L'Alsace en famille
Une fois n’est pas coutume (mais peut le devenir), la période que nous venons de traverser et traversons encore nous amène à créer une nouvelle rubrique éphémère. Derrière ce titre, « Récits », la volonté de faire exister une parole intime et artistique, loin des flux d’informations et des prises de position, qui raconte un ressenti commun, à hauteur d’individu. Cinq plumes de la région Grand Est livrent ici leur récit.
POISSONS ROUGES
Il y a Maman, il y a Chéri et mon chien, et il y a moi.
On joue à vivre dans un Aquarium depuis plusieurs jours. Je ne vais plus à l’école, ni au square, ni à la patinoire. Je ne vois plus mes copains. Chéri est un mauvais poisson rouge, il ne fait que jouer avec son téléphone. Maman est très douée : elle tourne en rond sans arrêt, et elle regarde toujours à la fenêtre. Bon, parfois on joue ensemble et parfois aussi, c’est moi qui ai le téléphone. J’ai le droit de téléphoner à Papa. Il est loin…
Je ne sais pas quand je pourrai le voir.
J’en ai souvent assez d’être un Poisson mais dehors, il y a le requin Corona. Maman dit qu’il faut attendre qu’il soit parti, qu’il peut nous rendre tous malades. Elle est siphonnée du bocal depuis qu’il est là… Quand elle sort le chien, elle lui désinfecte les pattes, et ses chaussures, et ses mains, et elle a un masque. Elle s’énerve…
Mais c’est bien aussi, parce que je la vois plus souvent et qu’on fait des gâteaux.
Dis, c’est quand qu’on arrête ? Dehors ça fait peur, mais dedans aussi, et je m’ennuie. Le temps passe et ne passe pas, c’est tout pareil mais enfermé, je crois que je ne grandis plus. Je n’aime pas être un Poisson rouge.
Émeline Mathéaud
IMAGINE
Aujourd’hui le soleil brille de mille feux et, hors de leurs cachettes, les terriens se réchauffent peu à peu.
Notre bel astre doré est venu apporter de la joie à nos journées. Et pour faire durer tout ça, les terriens dansent sans s’arrêter une fois. De la tête aux pieds ils se pa- rent de leurs plus belles couleurs, pour s’accorder avec la nature en fleur. Ils rient et chantent en musique, ils célèbrent l’arrivée d’un été fantastique.
Un petit terrien attrape alors ma main, m’extirpant de de cette foule endiablée. Il aimerait bien une glace pour le goûter.
Orane Danet
CONFINEMENT
Il y a ceux sans recul, sur le front.
Il y a ceux qui dressent, désœuvrés, des tours en carreaux de sucre.
Il y a, enfin, nous autres bavards ; persuadés qu’il fallait en dire quelque chose.
Jour un, tout va bien.
Jour dix, méditations sur l’horizon.
Jour trente, éloge de l’attente.
L’illusion croule devant
Ces carnets balbutiant en creux un désarroi,
Récits pétris de l’espoir, vite meurtri,
De tirer de l’homme confit une pulpe littéraire.
Aux barreaux mous de ma cage, j’ai moi aussi guetté l’étincelle.
J’ai tenté d’écrire, mais bien souvent ai-je brodé mes rengaines,
Étalé sur l’émail de bien ternes motifs ; en un mot plutôt qu’en cent, des platitudes.
Sur ce Cochemar collectif à la vie dure
J’ai tout dit, son contraire et le reste, accolant de force une raison d’être à l’aléa…
Un matin, une rédemption, la chance de tout changer ; Le soir-même
Une plaie, la rançon d’un hubris…
De vieilles mythologies réchauffées sur un coin de table. On en attend trop, trop vite, de l’écriture et ses bienfaits, On l’imagine magique, toute-puissante machine à emplir Nos maux d’une substance.
Le médecin, pourtant, n’a pas changé l’ordonnance :
Il nous faut vivre et écrire selon ce vieux mot d’ordre : patience.
Tristan Schal
NOUS-AUTRES
On se protège en se coupant de l’Autre.
Un Autre qui fait peur, envie. L’individu confiné porte en lui l’intériorité du collectif. Opportunité de limite :
le corps, la cellule familiale, les organes de régulation sociétale. Prise de conscience du subconscient social. L’omniprésence de l’Autre dans l’absence. Je suis partie d’Eux, donc Nous.
Nous survivrons tandis que Je peut-être non.
Destin de cellule dans un corps malade. Mouvements de connexion à l’Autre : dématérialisés sur la toile, ou concrétisés à la boulangerie où l’on sort, papiers en poche, voler un moment de liberté en achetant un morceau de pain. À sa saveur l’on se souvient : famille, moi et ma famille, ma famille dans la famille humaine.
À mes enfants je dis Regarde. Nous faisons partie d’Eux et nous Les retrouverons.
Émeline Mathéaud
OUI C’EST VRAI…
Oui c’est vrai j’ai serré les dents, particulièrement les quatorze premiers jours. Je guettais d’éventuels symptômes. Rarement je me suis autant écoutée : cette gorge qui commence à gratter, quelques frissons la nuit passée, un brin de nausée…
Oui c’est vrai les premières semaines j’étais trop connectée. Contrairement à ces dernières années je les consul- tais, je les écoutais : les JT, les chaines d’info, la presse en ligne ou celle en papier. Et puis, j’ai décidé d’arrêter, de me ménager.
Oui c’est vrai j’étais inquiète. Est-ce que mes proches se protègent suffisamment ?
Comment va cet.te ami.e atteint.e du Covid ? Comment va le grand-père de cet autre ami ? Cette cousine ? Ils vont mieux ? Ils rechutent ? Comment « fonctionne » cette fichue maladie ?
Oui c’est vrai ça a bien secoué. Les tensions avec ma fille se sont exacerbées. Deux mois, vingt-quatre heures sur vingt-quatre à se chercher, à décharger, à se remettre en question, à rire et parfois à pleurer. J’ai demandé de l’aide, il en fallait, sans quoi notre relation allait exploser.
Oui c’est vrai j’étais vidée. Je devais bosser, faire l’école à la maison, préparer chaque petit déjeuner, déjeuner et diner. Commander les courses, les désinfecter. Laver – nettoyer – ranger. Sans presque aucune possibilité de se ressourcer.
Oui c’est vrai j’avais parfois des coups de mou. Fini les terrasses avec les amis, fini les concerts, fini les soirées endiablées à danser, rire et chanter. Fini l’insouciance, fini les hugs et les baisers. Jusqu’à quand ? Est-ce que ces plaisirs appartiennent dorénavant au passé ?
Et malgré ce qui s’apparente à un marasme, ma fille a cessé d’avoir mal au ventre tous les jours et ma maladie chronique s’est calmée.
Quelle opportunité de stopper la course folle de nos vies quotidiennes !
De faire les choses quand c’est notre moment.
De ne plus courir partout pour arriver à l’heure.
De ne plus perdre de temps à consommer des choses dont on n’a pas besoin.
De ne plus côtoyer des personnes qui nous (em)brouillent.
Et, alors que dehors tout semble si hostile, de se sentir protégé.e.s chez soi parce que d’autres n’ont cessé de s’exposer : merci à eux !
Valérie Dietrich
SOLEIL ROUGE
Vous êtes peintre, écrivain, éditeur et papa d’une grande famille, comment avez-vous vécu cette pé- riode, le confinement, la maladie ?
Nous vivons dans la campagne alsacienne, je pense qu’il y a pire comme situation. J’étais tout de même assez strict surtout lorsque la maladie du Kawasaki est apparue. J’étais le seul à avoir des interactions sociales liées surtout à notre apprivoisement en vivres. Je suis d’ail- leurs le seul à être tombé malade.
Avez-vous su être créatif ? Avez-vous su écrire ou peindre durant ce printemps si particulier ?
Je n’ai rien su écrire. Ma parole et ma langue ont besoin de nourriture, d’inspiration extérieure, de souffle. Tous les projets artistiques auxquels je devais participer ont été supprimés les uns après les autres, un grand vide s’est installé. Souvent, lorsque je n’écris pas, la peinture s’impose d’elle-même et en l’occurrence j’ai dessiné plus d’une dizaine de planches.
Sur le sujet du covid- 19 ?
Oui ! C’est assez rare que je croque l’actualité, ce n’est pas mon procédé. C’est venu naturellement. J’ai eu la sensation que nous vivions dans un film de science-fiction, une mauvaise série B. J’ai eu envie, peut-être même besoin de faire replonger notre réalité dans une fiction, de l’y repousser. J’ai utilisé pour décor la ville de Strasbourg, les scènes sont rétro-futuristes. J’ai remplacé le masque qui nous barre le visage par une bulle munie de son propre écosystème. Cela a bien fait rire mes enfants, surtout le pangolin géant. Le but était aussi de leur démontrer que toutes les épreuves portent en elles un enseignement et qu’une situation même périlleuse peut se dépasser, que l’art a son rôle à jouer dans la traduction du réel.
Que vont devenir ces planches ?
Je les offre au personnel du monde médical que je connais, c’est ma manière à moi de leur démontrer ma gratitude. Aussi, elles seront publiées dans mon ArtBook qui devrait sortir en 2021.
Le père de famille que vous êtes est-il optimiste quant à la suite des évènements ?
Ni optimiste, ni pessimiste, ma clef de voûte c’est l’en- thousiasme ; être parent c’est un peu comme en philo- sophie : nous doutons souvent mais nous incarnons une forme de sagesse aux yeux de nos enfants et quoi qu’il en soit il faut avancer, se frayer un chemin par amour pour eux.
Grégory Huck
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